Construire des ponts au-dessus des clôtures

On peut considérer son voisinage comme une extension de la famille. L’harmonie entre voisin·e·s est essentielle, faute de quoi les années de cohabitation peuvent devenir éprouvantes. C’est ici qu’intervient la médiatrice Astrid Glod pour faciliter l’approche des solutions conciliatrices.

Au sein de la Commune de Sanem, 35 à 40 situations requièrent annuellement l’intervention de la médiation. Ce service gratuit et confidentiel, offert aux résident·e·s, vise à préserver la qualité de vie et la paix communale. Astrid Glod, collaborant avec 28 communes sur les affaires de voisinage, observe une tendance à l’égocentrisme croissant, surtout post-Covid : « Le respect et la compréhension mutuels ont diminué », dit-elle. Et les émotions s’exacerbent rapidement entre voisin·e·s. Difficile alors de trouver un consensus quand il s’agit de nuisances sonores, d’odeurs désagréables ou de verdure envahissante.

Médiatrice agréée depuis 23 ans avec des acquis dans le domaine de la psychologie, Astrid déconstruit d’emblée un stéréotype : il n’est pas nécessaire d’avoir des compétences juridiques pour exceller en médiation. La formation est désormais un master de quatre ans proposé à l’Université du Luxembourg. « Ma raison d’être est de simplifier la communication », explique Astrid. « Les gens nous contactent par téléphone ou courriel pour fixer un rendez-vous, bien que de plus en plus rarement en personne. Après validation, je transmets leur différend par lettre au voisin ou à la voisine. La simple présence de l’en-tête municipal sur le courrier a déjà un grand impact. 85% des cas sont ainsi résolus, si les voisins sont réceptifs, sans qu’une véritable médiation ait eu lieu. »

« Parlez d’abord entre voisin·e·s avant de contacter la médiation. » – Astrid Glod

Si les choses vont plus loin vers une médiation formelle, conformément à la loi sur la médiation, Astrid va proposer un accord préalable signé par toutes les parties avant de commencer. Dans le cas d’un accord final, celui-ci est signé par les résident·e·s impliqué·e·s. Une fois homologué par le tribunal d’arrondissement, cet accord a force exécutoire. En cas de non-respect, le·la hussier·ère peut être sollicité·e. Le Collège des bourgmestre et échevin·e·s ne sont informé·e·s que de manière générale des catégories de cas traités annuellement et l’anonymat est préservé.

Environ 15% des affaires présentent une complexité accrue. Astrid relate son cas le plus ardu, étalé sur trois générations pour un litige portant sur une parcelle de 30 cm de largeur. « On aurait peut-être pu y planter deux poireaux au maximum », se rappelle-t-elle. Les problèmes de bruit figurent parmi les plaintes les plus fréquentes, exacerbés par les structures simples des anciennes maisons, une problématique retrouvée également dans les appartements modernes. « Les bruits émis par les appareils comme les pompes à chaleur peuvent également devenir une source de litige, selon leur emplacement par rapport à la maison voisine. Et les aboiements de chiens constituent également une préoccupation. Certains de ces pauvres animaux sont seuls toute la journée, et clament leur délaissement par des aboiements excessifs. » L’élevage de poules ou la possession de ruches – très en vogue – ajoutent également au potentiel conflictuel.

Parfois, une médiation ne débouche pas sur un accord. « On le sent bien lorsque les discussions tournent en rond. Une médiation dure normalement une heure et demie. Après cela, les gens sont généralement fatigués ou la discussion recommence de zéro et devient émotionnelle », raconte Astrid. Dans ce cas, il y a lieu de donner un temps de réflexion aux parties et fixer un deuxième rendez-vous. En cas d’impasse, elle conseille alors d’autres voies de résolution, comme le recours à un·e avocat·e, bien que cela implique des coûts et des délais supplémentaires. La Commune de Sanem prend en charge les frais de médiation, mais tout ce qui excède relève de la responsabilité individuelle.

Il ne faut pas en arriver là. « Mon conseil est : parlez d’abord entre voisin·e·s avant de contacter la médiation. Car les gens ne font généralement même pas cette simple démarche initiale. Mais il faut rester calme, ne pas monter le ton et ne pas balancer des accusations. » Pour des litiges hors du cadre voisinage, d’autres ressources sont disponibles, comme le Médiateur de la Consommation pour les conflits propriétaires-locataires, ou l’Ombudsman pour les griefs relatifs à l’administration communale. En cas de conflits familiaux, le Centre de Médiation en ville offre son assistance. Tous ces services sont accessibles gratuitement.

 

 

Service de Médiation

E-Mail : mediation@suessem.lu

Répondeur : 621 67 36 48

Dans le cas de nuisances sonores, contactez :

Agents municipaux au 59 30 75 – 1
Commissariat de Police au 244 52 – 1000
Appel d’urgence 113

Renseignez-vous sur l’étendue de vos droits au Barreau de Luxembourg.

 

Les subtilités juridiques du vivre-ensemble

Le bruit

  • La musique, une passion qui franchit les limites

Un passionné de musique a formé un groupe de rock et décidé de répéter dans son garage tard le soir, souvent après 22h00. Les murs du garage, peu isolés, laissent passer chaque note et chaque cri. Les voisins, d’abord indulgents, commencent à se plaindre car leur repos nocturne est constamment interrompu. Selon l’Article III.3 du Règlement général de Police de la Commune de Sanem, le niveau sonore ne doit pas dépasser 30 dB(A) la nuit, ce qui équivaut une conversation à voix basse. Pour comprendre l’impact de cette réglementation, le musicien doit mesurer le niveau sonore de sa musique. Si le volume dépasse la limite autorisée, il risque des sanctions selon les articles 561 et 562 du Code Pénal.

  • Les travaux matinaux, un réveil inattendu pour les riverains

Une entreprise débute des travaux de construction. Ceux-ci commencent dès 6h00 du matin, une heure où la plupart des habitant·e·s dorment encore. Le bruit des machines, des marteaux-piqueurs et des camions résonne dans les rues, réveillant brutalement les résident·e·s. Selon l’Art. III.12 du Règlement, les travaux bruyants à proximité des écoles ou des hôpitaux nécessitent une autorisation spécifique de la bourgmestre, notamment pour prévenir les nuisances sonores. L’entreprise n’ayant pas obtenu cette autorisation se trouve en infraction. Ce cas illustre l’importance de planifier les travaux en respectant les horaires et les procédures légales pour minimiser l’impact sur la vie quotidienne des habitants.

  • Entre droit à l’animal de compagnie et respect du voisinage

Une résidente aimant les animaux, possède plusieurs chiens dans sa maison. Bien que ses intentions soient bonnes, les aboiements nocturnes de ses chiens deviennent un problème pour ses voisins. Des plaintes sont déposées, invoquant des perturbations du sommeil et du stress. L’Art. III.14 impose aux propriétaires d’animaux de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter que leurs animaux ne perturbent la tranquillité publique. Il faut donc trouver une solution, comme une formation comportementale pour les chiens ou un aménagement adapté dans le jardin pour réduire les aboiements la nuit.

Les limites de la propriété

  • Quand la haie déborde

Un jardinier amateur a récemment planté une haie le long de la limite de sa propriété. Avec le temps, celle-ci a atteint une hauteur de 3 mètres, dépassant largement les 2 mètres autorisés par l’article 671 du Code civil. Son voisin, dont la vue est désormais obstruée par cette haie, se sent lésé. Il faut donc repositionner ou réduire la haie pour respecter la réglementation et maintenir de bonnes relations avec le voisin. Un dialogue constructif peut aider à résoudre de tels conflits.

  • Le conflit souterrain des racines envahissantes

Une personne a planté un arbre à proximité de la limite de sa propriété. Avec le temps, les racines de cet arbre se sont étendues dans le jardin de sa voisine, causant des dommages à la pelouse et aux installations. La voisine, après avoir constaté les dégâts, décide d’agir. Selon le Code civil, elle a le droit de couper les racines qui empiètent sur son terrain. Ce droit est imprescriptible, ce qui signifie qu’il peut agir à tout moment. Ce scénario met en évidence la nécessité de prendre en compte l’impact à long terme des plantations sur les propriétés avoisinantes.

  • Les arbres anciens, un héritage naturel à préserver

Une habitante possède un grand jardin avec plusieurs arbres majestueux. Ces arbres, plantés il y a plus de dix ans, font maintenant partie intégrante du paysage. Bien qu’ils dépassent la hauteur réglementaire et soient relativement proches de la limite de propriété, ils sont protégés par la prescription décennale, comme stipulé dans l’article 671 du Code civil. Ce cas illustre la complexité des règles de plantation et la manière dont le passé et le présent se rencontrent dans la gestion de la propriété. Les arbres, tout en étant en infraction avec la loi actuelle, sont maintenus grâce à leur ancienneté et leur valeur pour le paysage et l’écosystème local.


Les distances de plantation légales

  • Moins de 2 mètres de haut : Peuvent être plantées près de la limite de la propriété, de préférence en gardant un écart de 50 centimètres par rapport à celle-ci.
  • Plus de 2 mètres de haut : Doivent être plantées à au moins 2 mètres de la limite de la propriété.

Exceptions

  • Accord entre voisin·e·s : Si les deux parties conviennent d’une distance différente et documentent cet accord.
  • Prescription décennale : Si la plantation existe depuis plus de dix ans sans contestation, elle peut être maintenue malgré le non-respect des distances réglementaires.

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