Gestion durable des forêts en mains privées

La gestion des forêts au Luxembourg se trouve dans les mains de personnes privées. Il est donc d’autant plus important que ceux·celles ayant une telle parcelle prennent soin de leur terrain. Pourtant, nombreux sont ceux·celles qui ne savent même pas qu’ils·elles sont propriétaires de forêts. Une excursion avec le forestier de Sanem, Claude Assel.

Le logo de l’ANF, l’Administration de la Nature et des Forêts, est bien visible sur le véhicule de service de Claude Assel. Depuis le tout petit parking situé près du Gaalgebierg, nous partons en direction de son territoire, la forêt. Ou comme le forestier l’appelle : « Le parc sauvage. La forêt est tellement fragmentée qu’elle ressemble plutôt à un parc. Saviez-vous que c’est la région qui compte le moins de forêts ? Ce n’est pas si grave, il faut bien que quelqu’un passe en dernier », souligne Claude en rigolant.

 

Avec autant de forêts – environ 55 % – entre les mains de 14 000 personnes, la qualité de ces forêts dépend de nombreuses personnes. « C’est pourquoi il est si important que chacun contribue à ce que nos forêts restent en bon état. » Originaire de Diekirch, Claude compte 40 ans d’expérience. Il sait qu’il y a toujours des gens qui ne savent pas que des parcelles de forêt leur appartiennent. Souvent, c’est le cas : La plupart des parcelles sont entre les mains de familles depuis des années. Comment les gens sont-ils·elles au courant ? « Cela a été inscrit dans un acte, par exemple. » De tels dossiers ne sont toutefois pas la norme. « Viens, on va essayer de simuler une telle situation », dit Claude en sortant sa tablette qu’il avait fixée avec une sorte d’harnais. « Voici le géoportail où il est possible de tout visualiser », dit-il en commençant à taper sur l’écran.

« Tu fais aussi attention à ta maison pour que tout soit en ordre. C’est exactement ce que tu devrais faire avec ta parcelle. » – Claude Assel

Quelques secondes plus tard, l’application nous indique l’endroit exact où nous nous trouvons. Les parcelles sur l’écran sont numérotées et marquées en couleur, selon qu’il s’agit de forêts publiques, communales ou privées. « Sur le terrain, tu peux aussi accéder aux données GPS », dit-il en sortant un petit appareil de sa poche. « Si tu entres ces données dans un tel GPS, il te guidera directement à l’endroit souhaité. » Et nous voilà déjà sur l’un des terrains que nous cherchions. Si l’utilisation du géoportail n’est pas claire, Claude est prêt à vous aider. « Dans ce cas, nous verrons ensemble où le terrain est situé, ce que nous pouvons faire ou ce qui est plus pertinent. »

Bien entendu, toute personne doit respecter certaines règles en ce qui concerne la gestion de sa parcelle. La nouvelle loi forestière, adoptée l’été dernier par la Chambre des Députés et en vigueur depuis octobre, fixe le cadre juridique. « La quantité de bois qui peut être enlevée de sa propre parcelle est fixée – pour plus de 40 mètres cubes, une demande est nécessaire », explique le forestier. Il cite un autre cas de figure. « Prenons par exemple la situation où vous voulez effectuer une coupe à blanc. Ce n’est pas aussi simple. Il faut vérifier si cette démarche peut être autorisée. Dans l’affirmative, il faut également informer la personne concernée que de nouvelles plantations sont nécessaires à cet endroit pour conserver le caractère forestier. »



 

Le forestier de Sanem estime préférable que la forêt ne soit pas uniquement gérée par l’État ou les communes. « Bien sûr, cela peut parfois poser des problèmes. » En ce qui concerne les parcelles privées, les externes doivent, comme leur nom l’indique, demander des autorisations si des travaux forestiers seront effectués sur cette partie de la fôret. « Comme ici – il y a tellement de chemins », explique Claude, « que ce soit à la randonnée, à la course ou au VTT. Si une parcelle privée s’y trouve, il faut vérifier à qui elle appartient. Ensuite, il me faut demander au service responsable. Dès que nous avons obtenu l’accord de la personne concernée, nous pouvons abattre cet arbre malade. » En principe, chacun·e devrait s’en occuper soi-même, « nous pourrions les inciter à le faire. Toutefois, cela peut être un peu difficile de temps en temps. Le but est de contribuer à l’intérêt général. » Il pourrait aussi arriver de faire monter quelqu’un sur l’arbre pour n’élaguer que quelques branches, sans abattre l’arbre entier.

« Dans ce cas, nous verrons ensemble où le terrain est situé, ce que nous pouvons faire ou ce qui est plus pertinent. » – Claude Assel

« Outre les lois et les règlements, le plan décennal est un autre élément important de la gestion durable des forêts », explique Claude en continuant à nous guider à travers la forêt. Il regarde autour de lui : « C’est assez simple : lorsque nous décidons de ce qui doit être fait dans nos forêts, nous ne le faisons pas selon la convenance du forestier. Nous avons des règles et des directives qui sont définies dans ce plan. Et comme pour toute entreprise, l’état des lieux de nos forêts est essentiel : que possédons-nous ? Où nous situons-nous ? Quels sont nos points forts ? Dans quelle direction voulons-nous nous développer ? Le plan actuel stipule notamment que nous avons besoin de jeunes arbres pour avoir de grands arbres à l’avenir. Cela prend du temps. »

Il pointe du doigt quelques troncs devant nous. « C’est une jeune plantation – nous l’avons plantée il y a bientôt dix ans. » Les arbres en face sont un peu plus grands que nous. L’objectif est alors de rendre nos forêts en bonne santé. L’inventaire phytosanitaire, au cours duquel une partie des arbres a été examinée de près, le montre clairement : 14 % ne présentent aucun dommage, plus d’un sur deux est fortement atteint et 12 % sont soit déjà morts, soit très affaiblis. « Nous avons besoin d’un mélange sain de différentes espèces d’arbres », souligne le responsable forestier, « car une fois qu’une maladie s’est manifestée, il ne faut pas tout abattre. » Comme ça, seulemement une partie de la forêt est touchée. Si les arbres étaient tous homogènes, il n’y aurait pas de résistance possible »

Il serait facile d’expliquer pourquoi les propriétaires privé·e·s en charge de nos forêts devraient être attentif·ve·s à ce sujet. « Tu fais aussi attention à ta maison pour que tout soit en ordre. C’est exactement ce que tu devrais faire avec la forêt. » Outre l’utilisation du bois de chauffage (bois de chauffage, parquet, palettes, industrie du bois d’essai), le bien-être de la forêt reste une priorité. « Si nous n’en prenons pas soin et ne plantons pas de jeunes arbres, nous n’aurons plus de grands arbres à l’avenir. » Avant de poursuivre, il dirige son regard vers la forêt, vers le haut de la cime des arbres. « Je peux donner quelques arguments : D’une part, la forêt produit énormément d’oxygène » – pas besoin d’en dire beaucoup plus à ce sujet – « D’autre part, un hectare de forêt peut filtrer 50 tonnes de poussière par an. C’est souvent négligé. » Un autre argument en faveur de la foresterie durable : surtout en période de sécheresse, de plus en plus fréquente, la forêt offre une possibilité idéale d’échapper aux températures extrêmes. « Nous avons ici toutes ces petites collines », explique Claude en regardant autour de lui, « l’air froid descend donc dans les villages et tout se refroidit de quelques degrés. »

Claude se décrit lui-même comme le « manager solitaire ». « Oui, c’est un peu un one-man-show, mais les autres travaillent aussi comme ça. Cela dit, je travaille aussi beaucoup avec d’autres services et je suis content de pouvoir compter sur eux. Nous échangeons aussi beaucoup entre forestiers. » Être un garde forestier est parfois excitant, parfois un peu moins. Ce que Claude apprécie particulièrement, c’est de pouvoir aménager la forêt selon ses propres idées. « J’ai en quelque sorte posé la première pierre pour les prochains forestiers. » Il se met à sourire. « Si jamais ils disent que je n’ai fait que des bêtises, ce seront eux qui auront un problème. »

 

Contact

E-Mail : claude.assel@anf.etat.lu

Téléphone : 247 – 56797

Mobile : 621 202 103

 

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